Aurore a sorti sa boule de cristal. Elle s’imagine le programme d’un week-end, passé, présent et futur. Elle t’emmène dans les jardins de Paris pour sentir les fleurs et évacuer l’alcool ingurgité au cours d’un vendredi soir trop arrosé. Mais surtout, elle prend le temps de dire au revoir à septembre.

 

Il me reste une journée pour honorer septembre, les mirabelles et le raisin. La barrière anticyclonique nous préservant d’un automne plutôt évasif, je décide donc de céder ces dernières heures de septembre à une douceur et une lumière encore estivales.

J’irai sur le haut de Belleville, là où les HLM regardent Paris et une tour Eiffel reculée, mais théâtrale. Je prendrai un rosé pour un peu alcooliser ces moments tièdes et pénétrants. J’irai manger des raviolis chinois un peu plus bas, près du métro, pour balayer les effets du vin. J’irai ensuite osciller de rue en rue pour congédier les effets de la Tsingtao, commandée avec les raviolis. Sur le chemin, j’écouterai le groupe La Femme et sa chanson « Septembre », car j’aurai trouvé ça très à propos et que son nouvel album est une délicieuse et énergique boulette de falafel.

Je me retrouverai intuitivement dans le plus gracieux jardin de Paris, celui du musée de la Vie romantique. Ce lieu est protégé de toute évolution historique, même les fleurs ont des formes et des couleurs d’un autre temps. Le soleil changera sa rotation pour inonder le jardin de sa progéniture, et mon banc en particulier. Je dormirai sur ce banc un peu dur et réaliserai que le métal n’est pas la matière la plus bienveillante pour le sommeil (j’irai très courtoisement soumettre l’idée d’un appétissant coussin auprès de la jeune personne à l’entrée, afin qu’au printemps prochain, je puisse très sereinement venir me languir dans le jardin en fin d’après-midi).

Il sera ensuite l’heure de raviver les effets de l’alcool de tantôt et de dire doucement au revoir à septembre. J’irai alors consommer la dernière anisette au bord du canal de l’Ourcq, en dessous de la passerelle. Je déciderai de ne pas compter les verres, ça fait avare. À minuit, j’aurai sacrifié ma matière grise à l’eau de la même couleur du canal et j’aurai abdiqué devant l’amertume de l’automne et le douloureux octobre. Je rentrerai chez moi en appliquant très précisément une mécanique ondulatoire désordonnée.

Le lendemain, j’en aurai fini avec le soleil et ses âneries. J’investirai des lieux plus obscurs. J’irai voir Clash, le film égyptien qui se déroule en été (celui que je viendrai d’abandonner), deux ans après la révolution du pays. Le réalisateur filme un fourgon rempli de manifestant-e-s de bords politiques divers et de convictions religieuses différentes.

Aux insouciances de l’été succéderont les réalités automnales.

Et j’embrasserai une dernière fois septembre, avant l’année prochaine.

 

Œuvres et lieux cité-e-s :