Nina déconstruit et rebâtit l’essence de son être par la lecture de ces autres qui nous apportent des clés, de la nourriture pour l’esprit et des armes pour affronter la vie. Qu’elle lise les mots de Toni Morrison ou écoute calmement la voix de Luz Casal, Nina trouve en elle-même les réponses à ses interrogations, se faisant la promesse secrète d’être celle qu’elle a toujours été.

 

Mes mains sont froides, surtout mes doigts. Certaines choses ne changent pas. Tu sais ce que l’on dit, « main froide, cœur chaud ». Ha ha – un sourire. Tout en écoutant Luz Casal chanter « Un Año de Amor », je lis Toni Morrison qui me parle de l’esclavage, et de cette sorte d’emprisonnement dans des rôles imposés. Ces rôles, dictés par une société dont la sauvagerie n’est plus à prouver, nous parlent aussi de nous.

Les gens ont du mal à comprendre ce que l’Altérité – au sens où Toni Morrison lui accorde la majuscule, comme une chose publique que tout le monde s’arrache – veut dire. Il s’agit d’un choix, qui se fait d’un côté ou de l’autre des individu-e-s ou groupes d’individu-e-s reconnaissables. On nous impose la manière dont nous sommes identifié-e-s par les autres ; avant de possiblement se trouver capables de choisir nous-mêmes la place qu’on voudrait avoir − et tenir − par rapport à eux et elles.

Comme le disait Antonin Artaud, « avoir de la pensée, c’est maintenir sa pensée, être en état de se la manifester à soi-même, et qu’elle puisse répondre à toutes les circonstances du sentiment et de la vie ». On est désigné-e-s, et avec un peu de chance, on arrive à être désigné-e-s par ce qui est le plus en adéquation avec notre être.

Mais toujours est-il qu’il faut se constituer les moyens d’être reconnu-e-s par cette chose intime et fragile que Donald Winnicott appelait le « vrai soi », lequel est souvent incommunicable.

Tandis que je continue de déconstruire les ronces qui ont couvé mes blessures et de construire de plus en plus les moyens de communiquer ce moi intérieur, il est temps de revenir à ce qui est le plus important.

Qu’est-ce qu’une promesse ? On met en jeu tout ce que l’on est dans une promesse. Avec une promesse, on ouvre une porte à la confiance de l’autre, en donnant la sienne au destin. Je te promets que je serai toujours là. Je promets que je ne ferai plus de mal, même si ce mal venait d’une blessure incompréhensible. Je promets que je serai digne de vous.

On ne s’enterre pas dans une promesse, on ne ferme pas des portes possibles. On se révèle à travers le choix que l’on fait de suivre une route juste, ou du moins qui nous semble juste. En général, la promesse porte en elle la marque d’une plus grande lucidité.

Je promets que je n’échapperai pas à ma promesse. Car je n’en ai pas envie. Car ce n’est pas moi.

Et parce qu’une promesse engage chaque personne jusqu’aux tréfonds de son âme.

Œuvres et lieux cité-e-s :

  • « Un Año de Amor », A contraluz, Luz Casal, 1991
  • L’Origine des autres, Toni Morrison, 2017
  • L’Ombilic des limbes, Antonin Artaud, 1927
  • La Capacité d’être seul, Donald Winnicott, 1963