Women who do stuff, c’est d’abord une newsletter qui parle de meufs qui font des trucs cool. Régulièrement, la missive digitale s’invite dans ta boîte mail pour te proposer de découvrir celles qui agissent au quotidien. Et en ce mois de juin 2019, tout passe à la vitesse supérieure. Ses créatrices, Mathilde, Mélissa et Lisa ont décidé de sortir un magazine papier, féministe et indépendant, écrit par des femmes et pour des femmes (trans, cis, fluid). Un projet ambitieux, financé grâce à une campagne sur KissKissBankBank, pour lequel elles ont besoin de ton aide. Elles ont accepté de répondre à nos questions pour t’expliquer leur démarche.

 

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Pouvez-vous nous présenter votre projet rapidement ?

Mathilde en a eu marre de constater que les meufs qui font des trucs sont trop peu mises en lumière et jamais relayées. Du coup, en 2017, elle a lancé la newsletter Women Who Do Stuff. L’idée : présenter chaque mois cinq femmes qui font bouger les choses, qu’elles soient connues ou non. Plus tard, Mathilde a été rejointe par Mélissa et Lisa.

Depuis janvier 2017, Women Who Do Stuff a mis en avant plus de 250 femmes de tous horizons et de plein de corps de métiers différents. On a notamment sorti une compilation musicale qui regroupe 12 artistes géniales et talentueuses. On a aussi collaboré avec Women in Games et Dialna.

Aujourd’hui, Women Who Do Stuff est devenue une association et notre prochain gros projet, c’est le lancement de notre premier magazine papier ! Ce premier numéro aura pour thème « Internet » : on est beaucoup à s’être construites grâce à ce médium, on y a découvert notre militantisme, on s’y est fait des ami-e-s. On y a aussi été harcelé-e-s. Illustratrices, autrices, photographes, poétesses… Nos contributrices ont plein de choses à dire sur ce sujet vaste et passionnant et pour notre part, on est bien contentes de pouvoir leur donner la parole.

 

Quels obstacles avez-vous rencontrés pour réaliser votre projet ?

En soi, le lancement de la newsletter s’est fait assez simplement et naturellement. Le format est idéal parce qu’on n’a pas de commentaires malveillants à gérer. La vraie difficulté, c’est tout ce qu’il y a autour : piloter Women Who Do Stuff sur les réseaux sociaux, faire notre pub, contacter les personnes, faire de la veille… On a l’impression de manquer de temps. Ce qui est super frustrant pour nous aussi, c’est qu’il y a tellement de meufs dont on voudrait parler ! C’est du boulot de rédiger ces cinq portraits tous les mois mais on a envie d’en faire plus, tout le temps. Du coup, on est super actives sur Instagram, où on présente aussi de nouvelles meufs régulièrement et sur notre compte Twitter, où on relaie beaucoup les projets et les réalisations des concernées.

Pour le magazine plus particulièrement, absolument tout est compliqué, surtout quand on a un job assez prenant à côté. Il a fallu gérer les 100 propositions d’articles et projets, répondre à tous les emails, contacter les illustratrices et journalistes avec qui on bosse, organiser la campagne de financement, faire notre plan de communication, la maquette du magazine, se mettre en relation avec des librairies, relire les articles. Bref, on a littéralement un deuxième 40h par semaine, mais c’est tellement cool à faire.

 

Pourquoi votre démarche est-elle nécessaire en 2019 ?

Cette démarche a toujours été nécessaire et elle le sera toujours. Les droits des femmes sont constamment remis en cause. L’actualité est terrible mais on essaie, à notre échelle, de relayer des démarches et projets positifs, de créer un réseau d’entraide.

Mettre des femmes en avant, c’est notre façon à nous de nous battre. Si à chaque fois qu’on parle d’une meuf au parcours atypique, une autre peut se dire : « Wow ça doit être cool, je vais tenter », alors, on a tout gagné. Quand on a lancé l’appel à contributions pour le magazine, on a reçu une vraie vague de soutien et de motivation. Il y a beaucoup de personnes qui ont envie mais bloquent. Il faut aller les chercher, et c’est notre job de le faire. Notre démarche est minuscule par rapport aux montagnes que certaines déplacent au quotidien, mais si on peut apporter un caillou à l’édifice, alors on est contentes.

 

Quel rôle joue la culture à vos yeux dans la lutte militante et féministe ?

La culture fait tellement partie de notre quotidien et nous influence tant qu’il est vital qu’elle soit plus représentative et plus inclusive. C’est important que les meufs puissent s’identifier et avoir accès à une grande variété de profils et de parcours.

Dans le magazine, on présente quatre personnes qui ont découvert leur non binarité sur Tumblr et sur des groupes de discussions. Montrer que les féminismes sont pluriels, que les meufs écrivent, chantent, dessinent, entreprennent, c’est capital. Depuis trois ans, par exemple, on privilégie les initiatives et créations culturelles. C’est important de savoir d’où on vient, de connaître les combats féministes, ce que les autres traversent, les soutenir.

 

Vous avez un conseil culturel pour nos lectrices et lecteurs qui aimeraient aller plus loin ?

En soutenant les créations des femmes et des personnes invisibilisées. En écoutant leurs histoires et, surtout, en mettant son ego dans sa poche. Ce n’est pas parce qu’on ne connaît pas quelque chose que c’est « bizarre ». Si tu ne sais pas quoi lire un jour, il y a forcément des dizaines d’autrices à découvrir. Internet est une mine d’or pour trouver des références et de fil en aiguille, on en découvre une autre, puis une autre… Lance-toi des challenges, du genre : « Cette année, je vais regarder 20 films par 20 réalisatrices différentes » ou « En juillet, je vais seulement écouter des artistes féminines ou de minorité de genre ».

Notre magazine s’inscrit dans cette démarche : sur les 50 personnes qui bossent de près ou de loin avec nous, il n’y a qu’un seul mec, le reste de l’équipe est composé de femmes (trans, cis, fluid). C’est un choix délibéré. Cela nous permet de mettre en valeur ces différentes voix, et de leur donner un espace bien à elles.