Ça y est, après des semaines à te parler de notre projet top secret, on peut enfin te le dévoiler ! On l’a en tête depuis plusieurs années et on y réfléchit depuis des mois. Avec joie, excitation et un petit peu d’angoisse (sinon, c’est pas fun), on se lance enfin dans une nouvelle aventure… celle de notre magazine papier ! Et on a décidé de commencer fort avec un numéro sur le thème de la colère.

 

Internet a changé notre vie, notre manière d’être au monde. Ce constat peut ressembler à une platitude, mais il n’en reste pas moins vrai. Grâce au Web, des personnes marginalisées ont trouvé une plate-forme collective sur laquelle s’exprimer. Des voix autrefois silenciées ont commencé à se faire entendre, à remettre en cause le statu quo et l’ordre social. Grâce à l’émergence d’espaces intimes, des communautés incroyables se sont créées. Celles et ceux qui se sentaient isolé-e-s et incompris-es ont croisé la route virtuelle d’individu-e-s avec lesquel-le-s échanger. Ils et elles ont pu s’ouvrir à d’autres vécus, d’autres réalités. Il serait donc inconscient de balayer d’un revers de main le bouleversement provoqué par l’arrivée d’Internet dans nos quotidiens. Sans lui, Deuxième Page n’existerait pas.

Dès la création de notre webzine, le tout petit groupe de nerds passionné-e-s que nous étions avait l’envie de proposer un format papier. Après tout, nous étions pour la plupart des enfants des années 1980 et 1990, et les livres ont été notre échappatoire favorite pendant longtemps – avant que n’arrivent les séries et le binge-watching, terrassant notre rigueur littéraire tel un ouragan le toit d’une maison de paille. Mais nous savions déjà ce que symbolisait ce format papier, les possibilités qu’il incarnait et, bien sûr, sa valeur.

En 2016, quand Deuxième Page est devenu le projet qu’il est aujourd’hui, Internet représentait la solution la plus évidente pour faire entendre nos voix, et partager avec toi notre vision du monde. Nous voulions offrir une alternative qui n’existait nulle part ailleurs, porter avec conviction nos combats. Nous voulions tout simplement nous faire une place dans une société qui, à d’innombrables reprises, nous avait fait comprendre que nous n’en avions pas. Mais désormais, près de quatre ans après le lancement de l’association et du webzine, alors que notre communauté a grandi et nos ambitions avec, nous sommes de nouveau appelé-e-s par ce désir de papier. Un désir qui peut sembler un brin archaïque, mais qui incarne toujours en nos cœurs un rêve de jeunesse : nous aussi, nous voulons occuper un espace spécial sur les étagères de ta bibliothèque. Nous avons donc décidé de nous lancer. Tout paraissait – et paraît encore – trop ambitieux pour nos épaules (et nos ressources financières inexistantes), mais qu’importe. Nous rêvions de ce magazine papier, nous allions le réaliser. Cela fait donc plusieurs mois que l’équipe de bénévoles travaille en coulisse à la conception de cet objet singulier, de cette revue tant désirée.

Si nous ne révélons notre projet que maintenant, c’est pour la simple et bonne raison qu’élaborer une publication papier de A à Z sans argent, et sur son temps libre, est une entreprise totalement absurde et susceptible d’échouer à chaque minute. Mais aujourd’hui, alors que les choses avancent et se mettent doucement  en place, nous pouvons confirmer et partager avec toi cette idée insensée.

Pour notre premier numéro, nous avions envie de choisir une thématique aussi vaste qu’essentielle : la colère. Cette émotion nous semble incarner l’un des enjeux les plus importants de notre époque, tant ses manifestations sont multiples et ses significations nombreuses. Elle est au croisement parfait de l’intime et du politique, le sujet idéal pour une exploration complexe et profonde. La colère peut être ambivalente, mais elle est généralement synonyme de commencement et d’émancipation. Elle est porteuse d’autres émotions, d’un sens historique, social et culturel. Pour reprendre les mots de la brillante journaliste et essayiste britannique Laurie Penny : « Raconter de nombreuses histoires et partager différentes expériences fait partie de ce qui crée un changement radical dans notre compréhension culturelle du genre et du pouvoir. […] Les politiques de la représentation culturelle sont en proie à la rage pour de bonnes raisons. »* Car nous vivons toujours dans une société profondément marquée par l’inégalité qui la structure, par l’oppression de toutes les personnes qui ne sont pas des hommes blancs, hétérosexuels et cis.

La volonté d’agir qui naît de la confrontation à la violence de la société capitaliste et hétéropatriarcale est souvent motivée par la blessure provoquée par cette même violence. De cette douleur, nous faisons quelque chose, ou en tout cas, nous apprenons à en faire quelque chose. La colère joue un rôle essentiel dans nos luttes et les actions qui les soutiennent. C’est un catalyseur, la source de tout. Alors, franchement, quel autre sujet pouvions-nous choisir ?

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Tu veux en savoir plus sur notre mag ?

Le premier numéro traitera de la colère sous de multiples formes, avec les voix de personnes connues et moins connues. Il parlera de militantisme, d’histoire, de culture, de société. Il mêlera analyses et tribunes, critiques et écriture créative. Avec évidemment des photos et des illustrations. Ce sera une revue belle et complète. On a déjà hâte de te la proposer ! Notre planning prévisionnel est le suivant :

  • D’ici fin janvier, recueillir toutes les participations, les lire et faire la sélection. En parallèle, on bosse intensément sur nos propres articles et on commence déjà les relectures ;
  • De février à mai, te préparer un mag d’enfer, toujours sur notre temps libre ;
  • Enfin, lancer notre campagne de financement participatif avant l’été. On aura alors besoin de ton aide pour relayer et, si tu en as les moyens, participer !

Notre objectif est de t’envoyer le mag à la rentrée. On ne s’engage pas sur une date (les aléas de la vie et du bénévolat font que tout peut prendre un peu de retard), mais on te tiendra au courant de tout !

 


*« The telling of many stories, the sharing of different experiences, is part of what’s creating a sea-change in our cultural understanding of gender and power. […] The politics of cultural representation are riven by rage for good reason », Laurie Penny, Bitch Doctrine, p. 145 et p. 151.


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