Les coups de cœur de Think tank by 2P

  • Queer et féministes, ces geek militent pour un Internet safe : Internet est loin d’être un espace où les femmes et les personnes LGBTQIA+ se sentent en sécurité. Néanmoins, cela n’empêche pas les prises d’initiatives par les concerné-e-s, car le numérique a tout de même « contribué à donner une visibilité à l’existence de ces identités et aux revendications de reconnaissance », souligne la chercheuse Hélène Breda. La Tunisienne Aïda Salander, fondatrice de deux associations de lutte pour les droits des femmes et des minorités sexuelles, ajoute qu’en Tunisie, « l’accès à l’information et à une communauté pour les personnes queer se fait d’abord sur Internet. C’est là où on cherche les définitions (queer, genderfluid, transidentité, le traitement hormonal…) et où on peut faire des rencontres ». Elle a d’ailleurs suivi des formations avec des hackers en Suède « pour apprendre les techniques de sécurité numérique et les adapter aux besoins des communautés LGBT+ en Tunisie ». Si c’est un domaine qui t’intéresse, le Reset a monté un hackerspace queer et féministe à Paris qui « propose des ateliers autour du code, des jeux vidéo ou de la cybersécurité ». [ChEEk Magazine]
  • Le travail du sexe est de plus en plus dangereux : la loi de 2016 sur la pénalisation des client-e-s a eu peu de retombées positives : « D’un côté de l’équation : le nombre de travailleuses du sexe diminue peu, puisqu’elles ont pour la plupart absolument besoin de ce travail pour subvenir à leurs besoins. De l’autre : le nombre de clients baisse à cause de la peur de se faire arrêter, même s’il y a en réalité peu d’interpellations. » Cette loi pousse les personnes concernées à accepter des client-e-s qu’elles auraient refusé-e-s si elles avaient été dans une situation financière plus stable. Le cas de la Suède, où il existe une telle loi depuis vingt ans, ne laisse pas présager d’amélioration : en plus de ne pas disposer de « données fiables démontrant une baisse du nombre de travailleuses du sexe » dans le pays, une étude a également montré que « les personnes vendant des services sexuels en Suède prennent moins de temps pour négocier avec les clients, et que cela réduit donc leur capacité à évaluer les risques potentiels ». [Slate.fr]
  • Quand des détenus philosophent sur la liberté : en France, les détenu-e-s pénitentiaires sont souvent laissé-e-s pour compte. On préfère ne pas penser à cet aspect de notre société, qu’il faudrait pourtant remettre en cause. Il serait ainsi bon de se replonger dans les textes d’Angela Davis, qui rappelle que le milieu carcéral, loin d’être un espace de réhabilitation citoyenne, est générateur de reproduction des violences (La prison est-elle obsolète ?, Au Diable Vauvert, 2014). Toutefois, certaines initiatives tentent de redonner aux prisonniers-ères des perspectives d’avenir et du sens, notamment par le biais de cours de philosophie. En France, dans 24 établissements volontaires, dont l’EPM (Établissement pénitentiaire pour mineurs) de la Valentine (dans le 11e arrondissement de Marseille), les jeunes poursuivent ainsi leur scolarité. L’association Les Philosophes publics, représentée par Marie-Laure Binzoni et Anne-Sophie Rousset, s’engage en les aidant à préparer un concours national qui leur permettra de sortir avec un diplôme. Au programme, la question « Le temps libre est-il le temps de notre liberté ? ». « En philosophie, explique Marie-Laure Binzoni aux élèves, contrairement à d’autres matières comme la science, il n’y a pas une seule bonne réponse attendue. Plusieurs personnes peuvent penser des choses différentes. L’intérêt est de développer ses idées, les remettre en question, même si on ne change pas d’avis. » Alors, « les “je sais pas quoi dire” laissent place à des mots puis des phrases que chacun prononce ensuite à voix haute. Ce n’est pourtant jamais gagné d’avance, mais cette fois, le défi est relevé. “Je serais dehors, même pas je répondrais à ces questions”, reconnaît D. Son camarade K. approuve : “Dehors, j’allais plus à l’école. Ici, je vais passer des diplômes que j’espère avoir. C’est un peu un mal pour un bien” ». [Marcelle]
  • Les femmes seront encore les grandes perdantes de la réforme des retraites : c’est un fait, la réforme de la retraite proposée par le gouvernement pénalisera davantage les femmes. Le système actuel, qui permet aux mères de bénéficier de huit trimestres de cotisation par enfant, va disparaître. Après cette réforme, elles ne cumuleront plus de points pendant leur grossesse et leurs congés maternité. Pour pallier cela, le gouvernement prévoit 5 % de majoration sur leur retraite par enfant, et ce à partir du premier. Cependant, d’après le rapport de l’Institut de la protection sociale publié le 26 novembre 2019, cette majoration ne compensera pas la perte du système actuel. Aujourd’hui, les femmes perçoivent 10 % de majoration dès le troisième enfant, en plus des trimestres. En 2016, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) avait déjà établi que les femmes touchaient 42 % de moins que les hommes à la retraite. [Basta !]
  • Revenu garanti, « la première vision positive du XXIe siècle » : Périphéries a été créé par Mona Chollet et Thomas Lemahieu. S’il n’y a plus d’activité sur le site depuis quelque temps, son contenu reste pertinent. Cet article défend par exemple la mise en place du revenu garanti, en s’appuyant sur les travaux de nombreux-ses auteurs, autrices et intellectuel-le-s. Le revenu garanti idéal devrait être d’un montant suffisant pour permettre de se passer d’emploi, comme l’expliquent les journalistes : « Renoncer à l’horizon illusoire du plein-emploi, ce serait aussi supprimer tous les dispositifs d’un coût exorbitant mis au service de cet objectif, comme les subventions englouties dans l’aide aux entreprises, et censées les inciter à embaucher – en pure perte. La question du mode de financement du revenu de base n’en serait que plus facile à résoudre. » Le déploiement d’un tel revenu impliquerait aussi de profonds changements. La vie des personnes sans emploi ne se réduit pas aux représentations de décadence et de paresse que certain-e-s en font. La députée allemande Katja Kipping l’exprime bien : « Il faut rompre avec les vieux schémas de pensée, en finir avec l’idée fausse que seul le travail rémunéré constitue une contribution méritoire à la société. En réalité, c’est souvent exactement l’inverse. » [Périphéries]

 

Sur les étagères et dans les oreilles de Deuxième Page

  • #Bibliotheque2P, le livre de la semaine : unique en son genre, la bande dessinée Tulipe (éditions 2024, 2016), de Sophie Guerrive, est une surprise pour quiconque met le nez dedans. Au premier abord, le côté naïf peut laisser croire que les thématiques le seront tout autant, et c’est bien ce contraste qui suscite l’intérêt : si les dessins et les personnages semblent simples, au détour d’une case, on se retrouve face à d’énormes questions existentielles. Perfectionnisme, angoisses, hyperactivité et désir de plaire sont autant de sujets abordés dans cette œuvre, reflétant parfaitement les grandes difficultés sociales d’une génération qui n’arrive pas encore à savoir si elle a un avenir ou non. Par le biais d’animaux anthropomorphes, l’autrice pose des questions qui font mal et y répond avec un humour à la fois doux et mordant, quand elle n’en pose pas simplement d’autres, plus vertigineuses encore. On finit par apprendre à aimer ses personnages et leurs imperfections. Et en acceptant leur étrangeté, nous acceptons la nôtre.

  • L’événement de la semaine : même si l’on ne t’en parle pas souvent, chez Deuxième Page, on aime aller au théâtre et découvrir des artistes sur scène, capables de nous transporter dans leur monde, de nous faire rêver ou rire. Le spectacle Tahnee, L’Autre nous a fait rigoler et réfléchir, un combo que l’on affectionne particulièrement ! Jeune femme noire et lesbienne, Tahnee part de son expérience personnelle pour nous parler notamment de ces deux pans de son identité. Elle évoque le racisme qu’elle a subi et son homosexualité qu’elle s’est cachée pendant des années… Les thèmes sont variés et parfois légers (défrisage, épilation, soirées lesbiennes…), mais la comédienne sait aussi aborder des sujets plus complexes, comme le coming-out ou la prise de parole d’Adèle Haenel, et mettre le doigt là où ça fait mal. Tous les mardis, à la Comédie des 3 Bornes, à Paris, Tahnee nous accueille dans son univers, que l’on prend plaisir à découvrir et que l’on rechigne à quitter.

 

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Image de une : manifestations du 5 décembre 2019 contre la réforme des retraites. © Gonzalo Fuentes/Reuters