C’est l’été ! C’est les vacances, on part se dorer la pilule… L’occasion idéale de s’intéresser à des œuvres culturelles qui nous sont passées sous le nez dans la frénésie de l’année précédente. Il ne s’agit pas ici de présenter la meilleure série ou le meilleur film, mais de faire connaître des œuvres qui m’ont émue, marquée d’une manière ou d’une autre, en toute subjectivité.

 

Battlestar Galactica
My Life Directed by Nicolas Winding Refn, de Liv Corfixen
Hurler sans bruit
Journeys In Classic Film
Sailor Flo
Château l’attente, de Linda Medley
Chris Marker à la Cinémathèque française
Emeli Sandé
Savannah Brown
Sally Jane Black

 

La série qui va t’obséder

Battlestar Galactica

Photo by: Carole Segal/SCI FI Channel/NBCUPB

Il y a des œuvres qui ont changé le paysage sériel plus que d’autres, et Battlestar Galactica en fait partie. Remake d’une série de 1978, elle a fait son apparition en 2004 sur Sci-Fi (maintenant connue sous le nom de Syfy). En cinq ans, elle s’est imposée comme un pilier de la science-fiction. Battlestar Galactica, c’est l’histoire de la survie des humain-e-s, forcé-e-s à voyager dans l’espace pour échapper à leur propre création : les Cylons, robots qui ont tellement évolué qu’ils ont pris leur indépendance. Avec cette fuite en avant, la série interroge la notion d’existence et d’humanité, mais aussi celle de la foi. Elle nous a donné des moments et des personnages mémorables, en prenant des prises de position inédites (le sexisme n’existe pas dans cette société), et parfois risquées (la manière dont la religion et le mystique sont représentés, par exemple). Battlestar Galactica est une épopée dans laquelle on aperçoit une tentative de réponse à cette question si simple, mais si vaste : qu’est-ce qui nous rend humain-e-s ?

Battlestar Galactica est sortie en DVD et en Blu-ray.

 


Le film pour entraîner l’esprit critique

My Life Directed by Nicolas Winding Refn, de Liv Corfixen

Dans Je Suis Jeanne Hébuterne, dont je t’avais parlé dans un article, Olivia Elkaim avance que si la jeune femme a arrêté la peinture, c’est parce qu’elle estimait qu’il ne pouvait y avoir qu’un seul artiste dans son couple – et a donc cédé sa place à Modigliani et sa personnalité écrasante. Ce genre d’inégalités au sein du couple n’est pas rare (Liv Strömquist en parle très bien dans Les Sentiments du prince Charles), mais ne rend pas My Life Directed by Nicolas Winding Refn moins crispant à regarder. La femme du célèbre réalisateur de Drive, Liv Corfixen, accompagne ce dernier sur le tournage de Only God Forgives − qui va être un échec critique. Elle en profite pour tourner un documentaire sur le sujet. Le titre, déjà, est parlant : c’est lui qui gère sa vie. Et ceci est confirmé à chaque fois qu’il perd pied : conscient que le film qu’il réalise n’est pas à la hauteur, il s’en prend verbalement à sa femme. Si visiblement le couple semble sortir indemne de cette expérience, un triste constat est posé par nul autre que l’éminent Alejandro Jodorowsky : Liv Corfixen devra choisir entre son couple et sa carrière de cinéaste et d’actrice.

My Life Directed by Nicolas Winding Refn est disponible sur Netflix.

 


Le podcast pour écrire

Hurler sans bruit

Avis à tou-te-s les écrivain-e-s en herbe : ce podcast est fait pour vous. En huit épisodes d’une vingtaine de minutes, les bases de l’écriture sont abordées : le présentateur se demande ce qu’est un-e auteur-rice, comment créer du suspense, etc. Avide lecteur (en témoigne la référence à Duras dans le titre du podcast, mais aussi celles dans les épisodes) et écrivain lui-même, il a des idées assez arrêtées sur certains sujets, mais essaie toujours quand même de nuancer son propos pour amener d’autres perspectives. Si l’on peut regretter que le nombre d’épisodes soit si limité, il n’en reste pas moins que Hurler sans bruit permet de faire le bilan, de manière simple, de ses forces et de ses faiblesses en matière d’écriture, pour pouvoir travailler dessus ensuite. Ce podcast est en somme une belle façon de lutter contre nos angoisses de jeune auteur-rice et de faire face à tous les challenges qui peuvent sembler insurmontables.

Hurler sans bruit est disponible gratuitement sur iTunes, YouTube et Djpod.

 


La newsletter des amoureux-ses de ciné

Journeys In Classic Film

Très récemment, en faisant des recherches sur Écrit sur du vent, de Douglas Sirk, je suis tombée sur un site nommé Journeys In Classic Film. La qualité était telle que je me suis immédiatement abonnée à la newsletter. Ici, tu trouveras des articles complets et éclairants sur un nombre incalculable de films, mais aussi sur tout ce qui concerne le cinéma classique, que ce soit des livres sur le sujet ou des expositions… Derrière ce projet, il y a Kristen Lopez, une critique de cinéma handicapée qui tient donc Journeys in Classic Film mais également un blog Médium, moins actif, dans lequel on peut retrouver des critiques de longs-métrages plus récents. Cette jeune femme prolifique publie, au bas mot, quatre articles par mois sur son site. Mais sa newsletter en elle-même est très classique : ce n’est qu’un e-mail automatique envoyé aux personnes inscrites. Néanmoins, au vu de la quantité et de la qualité du contenu que Kristen Lopez nous offre, c’est un mail que l’on a toujours plaisir à recevoir quand on s’intéresse au sujet.

Tu aimes le cinéma et tu veux t’abonner ? C’est par là.

 


La chaîne YouTube qui aime la SF

Sailor Flo

Depuis quelques années, on note sur Booktube l’émergence d’un mouvement plus féministe et militant que celui des booktubeurs-ses qui formaient initialement la communauté. Sailor Flo, aka Floriane, en fait partie. En trois ans, elle a créé un petit catalogue de vidéos mêlant présentations de lectures et regard critique sur la littérature. Dans sa rubrique Litté-râlement, elle parle de la place des femmes dans la littérature, de la SFFF (science-fiction, fantasy, fantastique) comme genre, ou encore de ces clichés insupportables que l’on ne veut plus lire. Elle aborde aussi, plus ponctuellement, le sujet de l’écriture : Floriane a en effet fini et fait publier son premier roman, Rouille, fin mai 2018. Grâce à la diversité des sujets abordés et à la passion qu’elle entretient pour la SF, son travail est un plaisir à regarder et à écouter pour élargir ses connaissances en littérature et aiguiser son regard critique.

 


Le livre de conte de fées

Château l’attente, de Linda Medley

Il y a des œuvres que l’on croise par hasard, que l’on ne connaît pas du tout et dont l’on tombe amoureux-se immédiatement. Château l’attente est de celles-là. Écrit et autopublié par Linda Medley, ce comics raconte l’histoire d’une jeune femme enceinte, Jain, qui fuit son mari abusif et se retrouve à vivre au château l’Attente en compagnie de créatures de conte de fées. Le vaste univers que Linda Medley a créé lui laisse une marge de manœuvre assez conséquente, mais sa grande force est indéniablement de garder une cohérence dans ce qui pourrait facilement tourner au n’importe quoi. L’autrice aborde en outre des thèmes éminemment féministes, comme la violence conjugale. Elle présente également des personnages en marge, qui trouvent dans ce refuge la famille qu’ils n’avaient plus. Lancé en 1996, ce comics n’est toujours pas terminé. Linda Medley se fait financer par un Patreon afin de pouvoir continuer son travail sur le tome 3, que j’attends avec une grande impatience.

Château l’attente devrait être disponible chez ton libraire préféré, ou tu peux commander le premier tome ici. Pour suivre le travail de Linda Medley, c’est par là.

 


L’expo qui transporte

Chris Marker à la Cinémathèque française

Né en 1921 et décédé en 2012, Chris Marker, dont Philippe Dubois dit qu’il est «  un peu le plus célèbre des cinéastes inconnus », a effectivement marqué le cinéma de manière durable avec son film-photo La Jetée, moyen-métrage de science-fiction sorti en 1962. Outre ce film, Marker a travaillé sur un nombre incroyable de choses, que ce soit des essais documentés ou des logiciels informatiques. Romans, essais, guides de voyage… Il semblerait que Chris Marker faisait tout, qu’il pouvait porter toutes les casquettes. Il nous a ainsi laissé une œuvre immense, toujours réfléchie et politisée. Malheureusement, c’est aussi une œuvre difficile d’accès. Avec l’exposition qui se tient à la Cinémathèque française jusqu’au 29 juillet, nous avons enfin la possibilité de découvrir les films majeurs de ce grand cinéaste, et pour ceux qui le connaîtraient un peu plus, de se pencher sur des objets introuvables jusque-là. La grande force de l’expo tient dans ses détails : le fond est certes très fourni, mais tout est surtout expliqué et remis en contexte. Un très beau moyen de (re)découvrir Chris Marker.

Tu veux en savoir plus sur l’expo ? Clique ici.

 


La musique des soirs d’été

Emeli Sandé

L’été, c’est souvent le temps de la pop pétillante pendant que l’on sirote une grenadine au bord de la piscine (pour les plus chanceux-ses) ou en terrasse après le travail. Pour une ambiance plus soul, mélancolique, de manière à regarder le soleil se coucher doucement avec l’ambiance qui va avec, tu peux te tourner vers Emeli Sandé, une chanteuse écossaise d’origine zambienne qui convoque tout un tas d’inspirations musicales dans ses titres. Il se dégage d’elle et de ce qu’elle fait à la fois une grande force et une indéniable douceur. Souvent comparée à Adele, elle mériterait d’avoir son succès tant sa voix nous transporte. C’est avec son dernier album, Long Live the Angels, que je l’ai découverte, mais c’est avec Live at the Royal Albert Hall − et surtout sa chanson « Daddy », la première du live − en 2013 qu’elle m’a définitivement conquise : sa présence sur scène est époustouflante. Que tu le regardes ou l’écoutes, cet enregistrement est une perle parfaite pour finir une journée de farniente.

Pour vibrer sur du Emeli Sandé, ça se passe chez ton disquaire préféré ou sur une plate-forme payante en ligne.

 


Une poétesse à découvrir

Savannah Brown

Deux types de poésie émergent ces derniers temps : le slam et la poésie minimaliste. Ces genres ont en commun le fait d’être des médiums privilégiés par les minorités pour s’exprimer (la chaîne YouTube Button Poetry en est un bon exemple). En 2015, Savannah Brown se fait connaître pour son slam « Hi, I’m a Slut » dans lequel elle dénonce le fait que peu importe ce que les femmes font, elles seront toujours vues comme des objets sexuels par les hommes et méprisées pour cela. Bien que peu prolifique, la youtubeuse continue de proposer des poèmes forts et engagés, qui abordent des sujets souvent difficiles, comme l’anorexie. Pour la lire, tu peux acheter Graffiti, son recueil de poèmes autopublié, mais c’est aussi en l’écoutant qu’on prend la mesure de sa voix : elle joue sur un ton monocorde pour contraster avec la dureté de ce qu’elle déclame. Il y a une honnêteté brute dans sa manière de réciter, face caméra, des textes souvent très intimes. À écouter seul-e le soir dehors, pour que les mots soient portés par le vent.

Savannah Brown enflamme YouTube de sa poésie par ici. Pour te procurer son premier recueil littéraire, GRAFFITI, c’est ici

 


Le bonus de la subjectivité

Sally Jane Black

À une époque où la critique de cinéma est ouverte à toutes et à tous, de nouvelles plates-formes permettent à des voix jusqu’à présent silencieuses de se faire entendre. C’est ainsi que Letterboxd nous a fait découvrir Sally Jane Black, une critique de cinéma trans et militante. Elle a référencé plus de 4 000 films sur son profil et en a déjà vu plus de 160 cette année. On pourrait croire que quantité et qualité ne vont pas de paire, mais dans son cas, rien n’est plus faux : la jeune femme peut parfois écrire de très courtes critiques assassines, mais souvent, ce sont de longs textes travaillés. Elle utilise la plupart du temps son vécu et ses opinions politiques comme point d’entrée, et ainsi amène les lectrices et lecteurs à comprendre son point de vue et les raisons pour lesquelles elle avance certains arguments et pas d’autres. La diversité des longs-métrages qu’elle voit et le travail de rédaction qu’il y a derrière font d’elle l’une des blogueuses les plus intéressantes à suivre sur Letterboxd. Elle m’a fait découvrir beaucoup de films, a changé ma perspective parfois, et cela n’est pas près de s’arrêter.

 


Image de une : montage réalisé par Deuxième Page. Crédits photos de l’article : © DR