Les coups de cœur de Think tank by 2P

  • Phoebe Waller-Bridge: ‘There was an alternative ending to Fleabag… but I’ll never tell’ : dans cette interview très fun à lire sur le Guardian, la merveilleuse Phoebe Waller-Bridge (créatrice des séries Fleabag et Killing Eve) répond aux questions d’artistes et auteurs-rices sur des sujets variés – sexe et cochons d’Inde inclus. « Essentiellement, j’écris des personnages en mal d’amour, mais qui ne savent pas comment le demander », confie-t-elle à Roxane Gay. [The Guardian] [ENG]
  • Beauty Brands Want to Sell Queer Expression, But It Shouldn’t Be for Sale : le nombre de marques de l’industrie cosmétique recourant désormais à des stratégies marketing visant des consommateurs-rices LGBTQIA+ ne cesse d’augmenter. Le but de ces publicités qui prônent l’inclusivité et la fierté est bien évidemment de vendre des produits. Haus Laboratories, Morphe, Milk Makeup ou encore M.A.C mettent en lumière des personnes LGBTQIA+, en affichant cela « comme un moyen d’aider à normaliser les diverses expressions de [ces] communautés ». Dans cet article, Riley R.L. porte un regard critique sur ces tendances : « Comme l’identité queer semble de plus en plus s’imbriquer avec l’industrie cosmétique, je me surprends à hésiter fortement à partager le rôle que le maquillage – une partie purement esthétique d’un processus profondément interne – a joué durant cette époque d’introspection. Quand je vois quelqu’un-e vendre du maquillage sous les auspices de l’amour-propre queer, peu importe à quel point cela peut-être animé de bonnes intentions, je ne peux m’empêcher de penser qu’une histoire comme la mienne est en train d’être emballée et vendue à de jeunes personnes queer qui cherchent désespérément à trouver de la confiance dans leur propre identité. […] Ces marques tirent parti des récits LGBTQIA pour rester pertinentes sur un marché concurrentiel, grâce à la relation très réelle et très compliquée que les personnes transgenres, non binaires et ne se conformant pas aux genres, comme moi, entretiennent avec les cosmétiques. » Riley R.L. ajoute : « [Ces marques] semblent opérer en partant du principe que la visibilité seule peut apporter des changements nécessaires dans la façon dont notre culture considère la non-conformité de genre. Et peut-être qu’elles ont raison ; mais en tant que personne non binaire, je ne peux m’empêcher de poser la question suivante : est-ce que la perception que j’ai de moi-même aurait vraiment été différente si j’avais vu quelqu’un comme [Jonathan] Van Ness porter du vernis à ongles sur un panneau d’affichage en grandissant ? Aurais-je fini par comprendre mon identité plus tôt si j’avais vu une personne ne se conformant pas aux genres sociaux sur un présentoir de cosmétiques ? Beaucoup de personnes queer grandissent avec le désir d’être vues et validées par la culture populaire, de la même manière que nos pairs hétérosexuels et cisgenres. Lorsque nous atteignons l’âge adulte, je crains que ce désir persistant nous empêche de protéger les jeunes générations contre les risques potentiels que la “visibilité” peut dissimuler. Si nous faisons confiance à la publicité pour faire avancer notre cause, plutôt que de partager nos histoires selon nos propres termes, nous les transmettons à celles et ceux dont l’objectif premier est d’en tirer profit. Ces récits aseptisés et corporatifs risquent d’amener les jeunes personnes queer à penser qu’incarner leur identité est aussi simple que d’acheter le bon rouge à lèvres ou de porter le bon vernis à ongles, au lieu de s’exprimer de n’importe quelle façon, de la manière leur semblant la plus honnête possible avec qui ils ou elles sont. » [Teen Vogue] [ENG]
  • La condamnation de France Télécom ne changera (malheureusement) pas grand-chose : le procès France Télécom s’est achevé sur la reconnaissance de la culpabilité des dirigeants de l’entreprise. Ces derniers, à la suite d’une vague de suicides chez les salarié-e-s, étaient accusés de harcèlement moral institutionnalisé. Si cette condamnation est une première, l’article rappelle néanmoins que de nombreux points de la souffrance au travail restent trop peu abordés. L’État notamment manque grandement d’investissement sur cette question : il « tarde aujourd’hui encore à inciter ou à contraindre les organisations à prendre réellement en compte la santé psychosociale des salarié·es face à des pathologies clairement documentées et toujours en augmentation, comme les conséquences du stress au travail ou de l’épuisement professionnel ». [Slate.fr]
  • « Désastreux », « angoissant », « du jamais vu » : l’échec de la COP25 après deux semaines de (vaines) négociations : le mois de décembre 2019 a marqué la fin de la COP25, dont l’enjeu était d’aborder la question du réchauffement climatique. Les conclusions du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU) étaient alors lourdes de sens : « La communauté internationale a manqué une opportunité importante de montrer son ambition pour répondre à la crise climatique. » Pourtant, face à l’urgence, la mobilisation citoyenne s’est densifiée, et ce partout dans le monde. À Madrid, la conférence « s’est également illustrée par l’affluence particulièrement forte des représentants de la société civile » pour tenter de sensibiliser le grand public à une cause qui nous concerne tou-te-s.  [France Inter]
  • En Inde, les femmes sont de plus en plus victimes d’attaques à l’acide : « La plupart des attaques à l’acide sont réalisées après le refus d’une demande en mariage », explique Avijit Kumar, directeur adjoint de l’ONG Acid Survivors & Women Welfare Foundation (ASWWF). La violence de nos sociétés patriarcales a toujours pour but de silencier les femmes et de réduire leur liberté de choix. Si les cicatrices et brûlures ne disparaissent jamais, tout comme le trauma psychologique, « la pire blessure reste la perte d’identité, due à la défiguration », précise le docteur Bhaskar Srinivasan. Afin de tenter de mettre fin à ces violences, les associations concentrent une grande partie de leurs efforts sur l’accès de tou-te-s à une meilleure éducation. [ChEEk Magazine]

 

Dans les oreilles et la bibliothèque de Deuxième Page

  • Passion podcasts, l’émission à écouter cette semaine : Un podcast à soi est une émission de Charlotte Bienaimé diffusée sur Arte Radio qui aborde chaque mois un sujet relevant des femmes, des corps, de l’intime et de l’expression personnelle. En interrogeant spécialistes et anonymes, elle explore le féminisme et les sujets qui en découlent. Comment vit-on les tabous ? Comment libère-t-on sa voix sur des sujets privés ? Qu’est-ce que ça veut dire avoir un corps jugé différent dans une société qui laisse peu de place à ce qui ne rentre pas dans ses cases étriquées ? Qu’est-ce que la violence, en a-t-on une définition correcte ? Études, enquêtes, questionnements… Dans ce podcast, il y a de la place pour chacun-e d’entre nous. Et que l’on soit concerné-e ou non par le sujet abordé, il est doux d’entendre ses sœurs parler de leur vécu pour mieux les comprendre. Dans leur douleur et leur rage, il y a toujours un peu de la nôtre, et même si nos expériences ne se croisent pas systématiquement, le sentiment de sororité qui résulte de chaque écoute est puissant. Alors, pour encore plus de solidarité entre femmes, vous reprendrez bien une petite louche d’un entre-soi féminin favorisant l’écoute et la réflexion ?

  • #Bibliotheque2P, le livre de la semaine : si tu aimes l’ambiance rétro et fantastique de Stranger Things, les belles illustrations et les personnages féminins badass, il y a de grandes chances que tu adores Paper Girls ! Il s’agit d’une série de bandes dessinées de science-fiction écrite par Brian K. Vaughan, l’un des scénaristes les plus en vue de l’industrie américaine de la BD. À travers six tomes publiés entre 2016 et 2019 (le dernier sortira en France en avril prochain), Paper Girls relate l’histoire de quatre adolescentes, Erin, Mac, KJ et Tiffany, habitant une banlieue de Cleveland, en Ohio, dans les années 1980. Alors qu’elles livrent des journaux le matin suivant Halloween, la ville est frappée par l’invasion d’une force mystérieuse venue du futur. Au programme, des intrigues et sous-intrigues à n’en plus finir : voyages dans le temps, parcours initiatiques, guerres de civilisations, premiers émois lesbiens et conflits générationnels… On s’égare parfois dans ce méli-mélo, mais c’est là toute l’intelligence du scénario, car justement, les personnages sont aussi perdus que les lecteurs-rices. En plus du dessin et de la colorisation toujours superbes, les dialogues sont remarquables, et les quatre héroïnes aussi riches et complexes les unes que les autres. Pas étonnant qu’Amazon vienne de commander l’adaptation en série de ces comics.

 

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Image de une : Paper Girls, de Vaughan Brian K., Chiang Cliff, 2016. © Urban Comics