Dans ce poème, Sophia raconte les violences faites à son corps, de celles qui marquent une existence mais n’empêchent pas d’espérer un renouveau aux couleurs de l’arc-en-ciel.

 

À l’occasion de la deuxième édition de Dépossédées, notre club de lecture, nous vous avions proposé d’écrire sur le thème « Mon corps et moi » et de partager vos créations sur le rapport que vous entretenez avec votre corps. Merci pour vos participations, toujours touchantes, et qui décrivent bien les relations ambivalentes que l’on peut avoir avec notre propre corps, tantôt belles tantôt douloureuses.

 
[Attention, ce texte évoque des sujets difficiles.]

 

En-corps

Un coffre-fort
Souillé
Par les crasses
D’un temps.

Un coffre-fort
Rouillé
Par mes larmes
D’antan

Sales
Et salées.
Mon corps a parlé
Comme un enfant :

« Laisse-moi crier
Quand tu pleures encore
Comme un nouveau-né,

Laisse-moi parler
Quand te touchent encore
Ces mains ridées,

Laisse-moi gueuler
Quand te frappe encore
Cette main illégale,

Laisse-moi être ton égal
Avant qu’une fois encore
Ton souffle ne soit coupé.

J’ai mal que tu aies mal
Malgré le temps
Malgré le sang
Malgré les traces
De vie sur ton corps
Pourtant vivant.

Ne me laisse pas pour mort
Pas encore,
Laisse-moi traverser le temps
Comme on traverse un champ
Brûlé par le soleil.

Laisse-moi traverser ta vie
Comme on rend hommage à un ami. »

Marron, rouge, bleu,
Violet, jaune et parfois noir,
Tu en as vu de toutes les couleurs.

Laisse-moi te montrer que c’est plus beau que ça
Un arc-en-ciel.

 


Image  : © Good Studio – stock.adobe.com