Les coups de cœur de Think tank by 2P

  • Une maison d’édition jeunesse réhabilite les écrivaines « plumées » par le patriarcat : la maison d’édition Talents hauts a décidé de rééditer des autrices oubliées et de les réhabiliter auprès du grand public. La nouvelle collection « Les Plumées » a été inaugurée le 21 février 2019 et propose déjà trois ouvrages en format poche. Elle devrait s’enrichir au fil de l’année. « Au vu des textes patrimoniaux et des programmes scolaires, dans lesquels figurent peu de femmes, on pourrait penser que celles-ci ont moins tenu la plume que les hommes. Mais on se rend vite compte que, comme dans d’autres domaines, les femmes ont été invisibilisées, copiées, spoliées par le patriarcat », explique Laurence Faron, fondatrice et directrice des éditions jeunesse Talents hauts. [Le Monde]
  • « I had to submit to being exoticised by white women. If I didn’t, I was punished » : dans ce texte, Courttia Newland veut aborder un sujet délicat et souvent tabou. À l’ère où la dénonciation de la misogynie devient plus visible et où le patriarcat est constamment remis en cause, l’auteur britannique désire parler de la façon dont certaines femmes blanches utilisent – consciemment ou non – leurs privilèges pour opprimer certains hommes noirs. Il relate certaines de ses propres expériences, traumatisantes, dont la fois où il a perdu son travail pour avoir refusé les avances de sa supérieure alors qu’il entamait sa carrière d’écrivain. Son article a pour but de lancer une discussion importante : « Il est clair pour moi [que ce qui m’est arrivé] est un exemple de la manière dont le privilège des femmes blanches est utilisé pour dominer un jeune homme noir. Il semblait que je n’avais aucun recours, aucun pouvoir. J’ai dû me soumettre au fait d’être exotisé, conformément au stéréotype hypersexualisé dans lequel on enferme souvent les hommes noirs. Quand j’ai refusé de répondre [à ses avances], j’ai été puni. » [The Guardian] [ENG]
  • Akiko Busch: Mrs. Dalloway Shows Aging Has Benefits : les femmes disparaissent-elles en vieillissant ? Non, évidemment. Mais la société, elle, est bien décidée à les invisibiliser. C’est le sujet qu’aborde l’autrice Akiko Busch dans son dernier livre, How to Disappear: Notes on Invisibility in a Time of Transparency. Elle explore les manifestations de ces femmes invisibles dans la culture et dans la société, comme les actrices, qui n’obtiennent plus de rôle après 40 ans, ou les femmes de 50 ans, qui se voient systématiquement refuser de potentiels entretiens d’embauche. Passé un certain âge, la valeur sociale des femmes semble diminuer, et cette dissolution progressive de notre identité intime et sociale peut avoir de nombreuses conséquences personnelles : « L’identité d’une personne, semble dire Woolf [dans Mrs Dalloway], est transitoire, et peut-être d’autant plus avec l’âge. À mesure que les femmes vieillissent, elles ont à leur disposition davantage de choix quant au moment et à la façon dont elles sont perçues. Cette disparition peut se produire rapidement ou être ressentie plus profondément. » [The Atlantic] [ENG]
  • Queer Eye’s Tan France: « The word gay was never mentioned in my parents’ home » : alors que la série Netflix Queer Eye vient de faire un retour très attendu, The Guardian est allé à la rencontre de Tan France, indispensable conseiller de mode des Fab Five. Dans cet échange, il raconte son parcours et sa façon d’aborder sa récente célébrité : « [Queer Eye] m’a donné la possibilité de représenter ma communauté d’une manière sans précédent. Et je ne parle pas seulement de la communauté gay, je parle aussi de la communauté asiatique. » Durant l’interview, il revient sur le racisme qu’il a rencontré durant sa vie, le manque de représentation à la télévision, son épanouissement professionnel, son histoire d’amour, sa manière d’aborder les choses de façon très terre à terre et sa discrétion assumée quant à sa vie privée. [The Guardian] [ENG]
  • Le nombre d’actes antisémites recensés a augmenté de 74 % en France en 2018 :  début février 2019, le ministre de l’Intérieur a annoncé que les actes antisémites en France ont augmenté de 74 % en 2018, passant de 311 en 2017 à 541 en 2018 : les arbres plantés à la mémoire d’Ilan Halimi ont été sciés, des restaurants, portails et sites parisiens ont été vandalisés, des illustrations de Simone Veil ont été taguées d’insultes antisémites. Le parquet de Paris a décidé d’ouvrir quatre enquêtes. Partout dans le monde, en particulier aux États-Unis et en Europe, les actes antisémites prennent de plus en plus d’importance, et les discussions tout comme les prises de décisions semblent totalement contre-productives. Alors, dans le capharnaüm du contexte social et politique, il est essentiel de dénoncer ces actes immondes, mais aussi de rappeler des choses que l’on pensait évidentes et qui, en 2019, ne le sont visiblement toujours pas. Il est aussi essentiel d’être vigilant-e-s face aux récupérations politiques, qui ne finissent que par aggraver la situation et simplifier la réalité dans laquelle la haine et la discrimination trouvent un terrain fertile pour s’exprimer de manière décomplexée. Plus que jamais, il nous faut lutter contre cette haine, celle qui s’affiche comme celle qui se lit entre les lignes. Chaque jour, à notre niveau individuel, nous devons lutter contre les discriminations. [Le Monde]

 

Dans la bibliothèque et dans les oreilles de Deuxième Page

  • L’événement de la semaine : depuis dix ans maintenant, la Queer Week s’invite à Paris avec une programmation foisonnante dédiée à la déconstruction des normes de genre. Elle a pour but d’ouvrir un espace de réflexion sur les questions de l’identité, du corps et des sexualités. Cette année, la nouvelle édition se déroule du 15 au 23 mars dans différents lieux, allant de La Mutinerie à La Bellevilloise, en passant par le Louvre et l’université Paris VIII à Saint-Denis. Tu pourras profiter de nombreuses occasions enrichissantes et culturelles : des projections, des tables rondes, des ateliers, des visites de musée et des performances, des discussions, mais aussi des lectures queer destinées au jeune public. Cette semaine est à la fois une célébration, la possibilité d’ouvrir ses horizons et l’occasion de questionner notre société. On espère donc t’y retrouver, et en attendant, voilà les événements qui nous ont tapé dans l’œil (mais en vrai, toute la programmation est vraiment super, donc n’hésite pas à la consulter dans sa totalité) :
  • #Bibliotheque2P, le livre de la semaine  : Marco Rizzo et Lelio Bonaccorso embarquent les lecteurs-rices dans un voyage terrible, bien que nécessaire. À bord de L’Aquarius est une bande dessinée documentaire, narrative et d’utilité publique tant elle éclaire la situation des migrant-e-s ces cinq dernières années. Auprès des professionnel-le-s qui œuvrent sur le bateau, les deux journalistes découvrent une vie qu’ils ne soupçonnaient pas : celle du sauvetage en mer de personnes comme nous, en détresse, en fuite, et qui bien souvent ne sont pas arrivées en Méditerranée sans souffrance. Nombreux-ses sont celles et ceux qui ont été torturé-e-s dans des prisons (notamment libyennes), et tout aussi nombreux-ses sont celles et ceux qui ont perdu sur la route vers l’Europe leurs proches, leur dignité et leurs espoirs. Rien ne nous prépare à une telle lecture, pas même la connaissance, au fond de soi, de combien migrer doit être difficile. Mais migrer n’est pas difficile : c’est surhumain. C’est inhumain. Ça ne devrait être le lot de personne et pourtant, chaque année, des centaines de milliers de personnes mettent leur vie en danger pour quitter leurs contrées, parce qu’il n’y a plus rien pour elles, là-bas. (Pour compléter ta lecture, n’hésite pas à lire Seuls les poissons morts suivent le courant, d’Alice Gautreau, dont nous te parlions en 2018. Dans cet ouvrage, elle fait le récit de son expérience de sage-femme et celle de sa mission sur L’Aquarius pour Médecins sans frontières.)

 

Les articles les plus lus sur Deuxième Page

  • Emily Dickinson, la poésie du quotidien comme art de vivre : le nom d’Emily Dickinson résonne de manière familière aux oreilles de beaucoup de gens. Pourtant, si la poétesse américaine du milieu du XIXe siècle figure parmi les autrices les plus connues du public, cette renommée cache une existence solitaire qui continue de fasciner. À l’occasion de l’anniversaire de sa naissance, nous avions publié son portrait, un humble hommage à sa poésie pénétrante et libre.
  • Pomme, ou l’envol miraculeux d’une artiste aux multiples facettes : Pomme est une artiste au répertoire musical oscillant entre légèreté et mélancolie. La jeune Lyonnaise de 22 ans détourne habilement le stéréotype de la chanteuse pop acidulée auquel on voudrait bien la reléguer, déposant dans ses chansons un sentiment de fêlure et de mystère.
  • Projectrices #2 : Axelle Jah Njiké, créatrice d’un podcast pour faire entendre la parole intime de femmes noires : la pluralité dans la représentation des expériences individuelles est plus que jamais une nécessité. Parmi ses nombreux engagements, l’autrice et entrepreneuse Axelle Jah Njiké a créé le podcast Me My Sexe and I, dédié à l’intimité de femmes noires : « Il est essentiel d’avoir des contenus illustrant un intime multiple et féminin, traitant du vécu, construit par et autour de celles concernées. J’avais ça à l’esprit avec ce podcast. Je crois que c’est ainsi qu’on peut créer un récit novateur, inclusif et conscient. »
  • Marguerite Durand, le journalisme comme moyen de lutte féministe : créatrice du premier quotidien féministe en France à la fin du XIXe siècle, Marguerite Durand a posé les bases d’un journalisme géré d’un bout à l’autre par des femmes. La Fronde, c’était un journal radical, subversif et impertinent à la rédaction non mixte.
  • La rentrée littéraire de Mx Cordélia : 5 lectures queer au rayon adulte : le rayon adulte et queer de ta bibliothèque est en souffrance, et tu te demandes comment le remplir ? Mx Cordélia t’a concocté un top 5 aux petits oignons.

 


Image de une : Tan France, pour Paper Magazine, 2018. © Katie Levine